Le son et la musique dans l’œuvre
de Bill Viola
Bill Viola et sa femme Kira Perov |
Bill Viola est né le 25
janvier 1951 à New York (Etats-Unis). Il vit aujourd’hui en
Californie avec sa femme et ses deux enfants .
Université de Syracuse, État de New-York |
Couverture de l'album de Franklin Morris, Ron marquisee, 1970 |
En 1972, il réalise sa première vidéo, Wild Horses, et travaille comme assistant d'exposition de Nam June Paik (artiste et musicien disciple de John Cage et acteur majeur de Fluxus) et de Peter Campus.
Performance de la violoncelliste Charlotte Moorman avec la sculpture de Nam Jun Paik TV Cello, New-York, 1971 |
En 1973, il obtient le diplôme BFA des Studios expérimentaux du Collège des arts visuels et du spectacle de l'Université de Syracuse. La même année, sa participation à l'atelier d'été des Nouvelles Musiques à Chocorua (New Hampshire) lui permet d'étudier la musique avec le compositeur David Tudor, dont il devient le collaborateur au sein du groupe de compositeurs Composers Inside Electronic. Il réalise avec ce groupe plusieurs performances et installations sonores à travers le monde. Dont la plus célèbre est Rainforest.
Le groupe Composers Inside Electronics, Berlin 1980 |
Performance du groupe CIE pour Rainforest 2 |
L’œuvre de Bill Viola représente la tendance lyrique de l'art des installations vidéos. A partir des années 70, il crée un grand nombre de bandes vidéos et d'installations qu'il définit comme autant de poèmes visuels dans lesquels il s'attaque aux questions d'identité et des préoccupations d'ordre spirituelles dans le monde moderne.
Durant cette première période, Bill Viola va s’intéresser à la performance, au cinéma expérimental et à la musique. Il utilise la caméra comme un outil qui intellectualise le monde, comme un instrument qui dissèque pour mieux analyser, saisir et décrire. C’est aussi pour lui un outil de perception du monde qui nous entoure. Ses premières recherches sur la vidéo le conduisent dès le milieu des années soixante-dix à réaliser des installations et des bandes extrêmement suggestives, que l’artiste commence, dès le début des années quatre-vingts, à transposer en une symbolique basée sur la pensée mystique et bouddhiste. Il va se servir de la vidéo pour explorer les phénomènes de la perception des sens qui mènent à la connaissance de soi. Ensuite, il traite l’image comme une partition musicale. Image et son ont une importance égale dans son œuvre. L’image permet de prolonger la perception sensorielle auditive.
Bill Viola, Information (1973, 29' , U-matic, NTSC, couleur, son, Collection Centre Georges Pompidou, Paris) |
Bill Viola, Playing Soul Music to My Freckles, 1975, 2:46 min, color, sound |
Bill Viola, He weeps for you, 1976 |
Bill Viola, He Weeps for You (detail), 1976 |
Bill Viola, He Weeps for You (1976) videosound installation water drop with microlens, amplified drum, projection in a dark room |
Dans He weeps for
you 1976 (Synapse video center
université de Syracuse New York Etats Unis, installation ), il
montre une goutte d’eau tombant d’un tuyau de cuivre. La
gouttelette est vidéoprojetée agrandie de façon à refléter la
pièce environnante et ses occupants. Un bruit sourd résonne lorsque
la goutte touche une percusion au sol, ce qui donne à cette action
apparemment anodine une inquiétante etrangeté. Ce travail fait
allusion à la philosophie traditionnelle de la correspondance entre
le microcosme et le macrocosme inspiré de la pensée orientale et
des théories de la physique contemporaine qui montrent comment la
moindre particule de matière contient des connaissances et des
informations sur l'état du système tout entier. De cette
installation, il dit: «J'ai tenté de créer un espace accordé où
non seulement tout est enfermé dans une seule cadence rythmique mais
où un système dynamique interactif est produit, dans lequel tous
les éléments la goutte d'eau, l'image vidéo, le son, le spectateur
et la pièce elle-même fonctionnent ensemble de manière unifiée
comme un instrument unique et plus grand». L'œuvre repose sur un
processus d'agrandissement: en modifiant l'échelle de ce qui devrait
être normalement un événement accessoire pour l'amplifier à la
fois visuellement et acoustiquement jusqu'à ce qu'il domine
l'espace. Un examen plus serré révèle que le processus unificateur
qui sous-tend l'œuvre est un phénomène optique. La goutte d'eau
agit elle-même comme une lentille et s'intègre de la sorte au
système optique de la caméra vidéo. On peut voir une image de
l'espace tout entier et de ceux qui s'y trouvent, image dont on
constate qu'elle est contenue dans la structure anamorphique de
chaque goutte d'eau. Cette distorsion optique accroît à mesure que
la goutte gonfle pour finalement tomber hors de l'image et s'écraser
sur la surface amplifiée qui se trouve en dessous, inaugurant alors
un nouveau cycle.
Songs of Innocence (9'34) est un chant de l'enfance à deux temps. Une chorale sur la pelouse verdoyante d'une école interprète une comptine. La lumière tombe progressivement sur cette scène "idéale" et la recouvre de nuit. Après le départ des enfants, dans leur trace encore vivante, ne restent plus qu'une flamme et, à côté, un objet non identifiable. C'est alors que les corps fantomatiques de la chorale réapparaissent, s'incrustent en transparence dans la nuit, en esprits, et rejouent leur scène enfantine. Entre le silence et les ténèbres, entre le jour et la nuit, un bouquet d'orchidées et la flamme sur le sol marquent d'une mémoire mortuaire cet espace vide comme un tombeau.
Bill Viola, Songs of innocence |
Bill Viola, Space between the theet |
On retrouve l'utilisation du cri de façon récurente dans le travail de Bill Viola :
The Amazing Colossal Man, 1974,
vidéo noir et blanc, installation sonore, événement d'une nuit d'août 1974,
projection sur écran placé devant la fenêtre double de son studio de Syracuse,
photocopie de 1974, Experimental Television Center Collections.
Bill Viola, The Amazing Colossal Man, 1974 |
« Anthem
(Hymne, 1983) de Bill Viola est une
vidéo structurée autour d'un cri perçant et unique émis par une
jeune fille de onze ans alors qu'elle se tient sous le grand hangar
de la gare d'Union Station à Los Angeles. Son cri, d'une durée de
seulement quelques secondes, se propage hors des murs de briques du
hangar.
Bill Viola, Anthem, 1983 |
Bill
Viola a ralenti, étiré, modulé, et par ailleurs modifié le son de
la voix de la jeune fille pour créer cette bande sonore pour une
symphonie de la ville post-industrielle qui est inquiétante. Le cri
d'origine est étendu dans le temps et décalé en fréquence pour
produire une échelle de notes harmoniques qui constitue la bande son
à laquelle Viola juxtapose des images du matérialisme - industrie
et culte du corps, pompes à huile géant et battements de cœur
humain, voitures le long d'une autoroute et sang qui coule dans les
veines, technologie chirurgicale moderne et branches d'arbres dans
une forêt ancienne. Le cri angoissé traverse la corporéité du
corps et de la culture contemporaine comme un organisme vivant.
Bill
Viola rapporte cette structure à la forme et la fonction des chants
religieux, les chants grégoriens notamment (en utilisant une échelle
harmonique dans une salle de résonance) et des chants tantriques
bouddhistes (rituel d'exorcisme et de conversation avec les
démons). Pour lui, la pièce est une évocation rituelle de «
nos peurs primaires les plus profondes, l'obscurité et la séparation
du corps et de l'esprit. »
Silent Montain (2001) est une vidéo muette qui montre un homme et une femme hurlant au ralenti .
Bill Viola : « le hurlement le plus fort que j'aie jamais enregistré est peut-être ce Silent Mountain muet ». Selon Viola, le silence de cette image en mouvement fait écho à la peinture religieuse de la Renaissance mais, comme il le dit lui-même : " les images anciennes sont juste un point de départ. Je ne suis pas intéressé par leur appropriation ou leur reprise. Je veux entrer dans ces photos .... les incarner, les habiter, pour les sentir respirer ".
Bill Viola Silent Mountain, 2001 photo by Claudia Zevi & Partners |
The Talking Drum, 1979 (22:56)
(For Herman Heins) Performance, 1982
Bass Drum, temple gong, pre-recorded sound, and electronics
Performed by Bill Viola
Side B
Hornpipes, 1979-82 (18:11)
PVC pipes, voice
Performed by Ralph Jones, Bill Viola, Yoshi Wada
Pulses (Duomo Bells), 1982 (4:10)
Metronome, pre-recorded sound, and electronics
Performed by Bill Viola
La
dimension mystique du son de certaines pièce se retrouve dans l’intérêt de Bill Viola pour les religions et la philosophie
orientales. Cet aspect est directement mis en scène dans sa plus
longue vidéo
I Do Not
Know What It Is
I Am Like
(1986) . Le dernier chapitre nous montre une cérémonie religieuse et
la musique qui l'accompagne.
Deserts, (1994) fut créée pour accompagner la performance en direct du compositeur Edgar Varèse (1855-1965). Après avoir découvert des notes du compositeur se référant à une composante imagée non réalisée de sa composition, l’Ensemble Moderne, un groupe de musique contemporaine basé à Francfort, a commandé à Viola la création d’une partition visuelle pour Déserts de Varèse.
Deserts, (1994) fut créée pour accompagner la performance en direct du compositeur Edgar Varèse (1855-1965). Après avoir découvert des notes du compositeur se référant à une composante imagée non réalisée de sa composition, l’Ensemble Moderne, un groupe de musique contemporaine basé à Francfort, a commandé à Viola la création d’une partition visuelle pour Déserts de Varèse.
Pour la tournée Fragility 2.0 du groupe metal-indus Nine Inch Nails, gravé sur le DVD And That I could have been de 2002, Bill Viola crée une scénographie multi-écran pour les titres La mer, The great below et The mark has been made. Les bonus du DVD incluent une interview en anglais sur ce travail.
Tristan et Yseult (Peter Sellars - Mise en scène / Richard Wagner - Compositeur)
En supprimant en 1951 le décor construit pour le remplacer par une simple ambiance lumineuse, Wieland Wagner change toute l'esthétique de représentation de l'opéra. Cette utilisation d'une technologie unique et impalpable, la lumière, qui devient décor et plus encore état d'esprit, est en fait bien une révolution, qu'on soit revenu ou non à des volumes construits sur scène depuis. Une autre révolution technologique s'est peu à peu mise en place depuis les années quatre-vingt, avec la projection, de décors réalistes, de films, oniriques ou réalistes, ou de jeux de laser, qui permet de construire des espaces virtuels... Au début du XXIe siècle, c'est la vidéo qui s'installe à son tour dans l'environnement spatial de l'opéra. Non plus film projeté, mais bien apparition d'un nouveau moyen d'expression, devenu presque une fin en soi dans La damnation de Faust de Robert Lepage, ou plus encore les magnifiques Paladins signés José Montalvo et Dominique Hervieu, tant l'intégration du spectacle vivant y est assurée avec maestria dans le spectacle projeté.
On peut bientôt distinguer cette intégration de la juxtaposition de la vidéo et de l'action théâtrale, telle que la pratiquent Peter Sellars et Bill Viola dans leur Tristan et Isolde de l'Opéra-Bastille, en 2005. La vidéo y devient une strate entière et primordiale du spectacle, noyant et anéantissant presque le jeu des « vrais » acteurs du drame, jouant avec eux en costumes noirs dans une boîte noire sans décor aucun, avec pour tout accessoire un parallélépipède bas - banc, lit, pierre tombale - tout aussi noir. Un Tristan assurément pas sans image pourtant, le fond de la boîte étant un vaste écran recevant en continuité ces projections mouvantes et sophistiquées qui ont fait la renommée du vidéaste américain.
Artistes
et personnalités :
Bill
Viola -
Plasticien(ne)
sources:
Page biographique sur Bill Viola
Page biographique sur Bill Viola
http://pat.hernandez.pagesperso-orange.fr/billviola.htm
Site sur la performance
Site sur la performance
https://artplastoc.blogspot.fr/2016/08/584-le-cri-dans-les-uvres-de-bill-viola.html
Page sur l'opera Tristan et Iseult
Page sur l'opera Tristan et Iseult
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